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Première réunion du projet CO3i (Connaissances collectives et cognition individuelle : conceptions, croisements disciplinaires, données)

Ce projet est porté par la Mission pour l’Interdisciplinarité du CNRS, par l’IXXI (Institut rhônalpin des systèmes complexes) et par le laboratoire ICAR (ENS Lyon).
Quand ? Le 16/06/2017,
de 10:00 à 17:00
Où ? Salle des conférences du Centre Blaise Pascal, bâtiment LR6
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La distinction entre collectif et individuel est souvent superposée à l’opposition entre social et cognitif. Les phénomènes sociaux sont perçus comme collectifs alors que le cerveau de l’individu serait le siège de la cognition. Pour réanalyser et mieux articuler cette double opposition, nous organiserons une séquence d’ateliers interdisciplinaires confrontant quatre points de vue : les approches sociales de la cognition, les approches cognitives du social, l’approche systèmes complexes, la philosophie des sciences. Nourrie de projets usant de méthodologies diversifiées (données massives, expérimentation, observation, corpus), la réflexion sera finalisée vers la publication d’un ouvrage et d’articles de portée internationale.

Les séminaires et la participation aux débats sont ouverts à tous.

 

Programme de la première journée

 

9h30-10h : Accueil et café

10h-11h Ouverture – Jean-Pierre Chevrot, Equipe Dante (IXXI) et Lidilem (Université Grenoble Alpes)

  • Tour de table

  • Rappel des objectifs du projet et des contraintes sur sa réalisation

  • Présentation des diapositives envoyées par les collègues absents

 

11-12h Daniel Andler, Université Paris-Sorbonne & Académie des sciences morales et politiques

Comment articuler système cognitif et système social : quels outils ? Pour quoi faire ?

(voir résumé ci-dessous)

14h-15h Laurence Kaufmann, Université de Lausanne

Comment la société est-elle possible? Vers une «sociologie intégrative »

(voir résumé ci-dessous)

15h-16h Pablo Jensen, IXXI et Laboratoire de Physique, ENS Lyon

Que savent du collectif les atomes sociaux dans les modèles multi-agents?

(voir résumé ci-dessous)

16h-16h30 Pause

16h30-17h Bilan de la première journée et programmation de la suite

 

Résumés des présentations

 

 

Daniel Andler, Université Paris-Sorbonne & Académie des sciences morales et politiques

Comment articuler système cognitif et système social : quels outils ? Pour quoi faire ?

http://andler.dec.ens.fr/

Dans un exposé qui n’aura pas été longuement préparé, et qui a pour seul objectif de contribuer à lancer la discussion, je présenterai quelques-uns des outils développés depuis une vingtaine d’années dans un cadre évolutionnaire dans le but de comprendre à la fois ce qui, dans la constitution humaine, rend la socialité possible et lui confère les formes qu’elle revêt, et ce que cette même constitution, et les formes variables qu’elle prend, doit à l’appartenance sociale de l’individu. Selon le temps disponible (pour la préparation et pour l’exposé), et avec l’aide espérée des autres participants, j’évoquerai les propositions d’auteurs tels que Tomasello, Boyd et Richerson, Gintis et Bowles, Laland et Odling-Smee, Sterelny, Sperber... ; et j’inviterai notre groupe à s’interroger sur le type de résultat qu’on peut espérer obtenir en s’appuyant sur ces outils.

 

Pablo Jensen, IXXI et Laboratoire de Physique, ENS Lyon

Que savent du collectif les atomes sociaux dans les modèles multi-agents?

http://perso.ens-lyon.fr/pablo.jensen/

L’approche multi-agents consiste à partir d’individus possédant des caractéristiques internes définies, pour observer les propriétés de la « société » globale qu’ils font émerger via leurs interactions. La Revue française de sociologie a consacré récemment un numéro spécial à cette méthode contestée de modélisation du social. Pour ses partisans, cette méthode représente un graal qui permettrait de tenir à la fois la rigueur mathématique, la flexibilité de l’appareil analytique pour « sortir de l’impasse » (p. 666) de l’économie mathématisée, la possibilité de prendre en compte des mécanismes cognitifs complexes chez les individus, la résolution du problème « fondamental de la sociologie » qu’est le passage micro-macro…

Dans cet exposé, je présenterai un exemple simple de modèle multi-agents, proposé par Schelling en 1971 pour comprendre la ségrégation raciale. Je discuterai ensuite de la pertinence de ce modèle, et d’autres plus sophistiqués, pour comprendre le monde social réel. Cela nous amènera à une discussion sur l’ontologie du social, notamment en comparant les atomes « sociaux » et ceux utilisés par les physiciens pour comprendre le monde matériel.

 

Laurence Kaufmann, Université de Lausanne

Comment la société est-elle possible? Vers une «sociologie intégrative»»

https://lc.cx/SzVr

«Comment la société est-elle possible?», se demandait Georg Simmel. Reposer cette question, trop souvent oubliée par les sciences sociales, c’est se réinterroger sur les capacités cognitives et les processus sociaux qui permettent à la société de prendre forme. Pour relancer une telle interrogation, il faut tout d’abord préciser ce que «société» veut dire. Pour les sciences cognitives comme pour les sciences naturelles telles que la biologie et l’éthologie, la «société» renvoie aux formes d’interaction sociales élémentaires, récurrentes et universelles, qui composent le tissu conjonctif de la vie sociale. Pour les sciences humaines et sociales, le concept de « société » renvoie aux associations humaines conventionnelles qui ont été stabilisées par le travail au long cours des traditions, des systèmes symboliques, des structures sociales et des instances de socialisation et d’enculturation qui font des êtres humains des êtres essentiellement cultivés. Enfin, pour la philosophie politique et l’histoire, le concept de « société » renvoie à une invention politique proprement moderne, celle qui a permis, au 18e siècle, de faire du lien de la societas, contractuel, libre et temporaire, que l’individu privé est susceptible d’entretenir avec ses semblables le modèle normatif du lien social, rompant ainsi avec le lien théologico-politique qui subordonnait les sujets à une totalité fondamentalement hétéronome. L’ontologie feuilletée de la « société » que mettent en évidence ces trois types de définition, sociale, culturelle et politique, permet d’éclairer différentes compétences et conduites humaines. Alors que les compétences relationnelles et déontiques sont au cœur de l’ontologie sociale, les compétences à la distanciation, qu’elles revêtent la forme de la déférence ou celle de la distraction, sont au cœur de l’ontologie culturelle. Enfin, les compétences à l’imagination et aux raisonnements contrefactuels sont au cœur de l’enquête collective sur les orientations de la vie en commun qui caractérisent idéalement l’ontologie politique.

Plutôt que de dissocier ces ontologies et de laisser de côté les compétences qui leur sont corrélatives, la sociologie aurait tout intérêt à les intégrer dans une réflexion générale qui préserve ses nombreux acquis tout en les articulant avec les autres savoirs scientifiques. A l’heure des cloisonnements disciplinaires et de l’hyperspécialisation que déclenche la division croissante du travail scientifique, une telle sociologie «intégrative» paraît particulièrement souhaitable. D’une part, elle permet de déployer une conception scientifiquement réaliste des mécanismes intuitifs de bas-niveau aussi bien que des capacités réflexives sophistiquées qui permettent aux êtres humains de «faire société». D’autre part, une telle entreprise «intégrative», loin de rompre avec la visée émancipatrice du discours sociologique, la prolonge et l’étend à de nouveaux territoires: au dévoilement des interdépendances systémiques et des structures opaques dans lesquels les agents ordinaires sont immergés, elle rajoute le dévoilement des processus cognitifs et émotionnels que tout un chacun met en œuvre, bien souvent à son insu. L’analyse de ces processus cognitifs et émotionnels permet de revisiter les objets traditionnels de la sociologie, que ce soit l’autorité de la première personne, la constitution des collectifs, le rôle des émotions, la nature des normes morales ou les ressorts de la domination.